Nous sommes donc entre 1640 et 1670.
Nul lieu n’a plus de légende de trésors arrachés aux galions que cette île. La Tortue développe au nord des montagnes tellement inaccessibles qu’on l'appela la « côte de fer ». Au sud, son port offre un excellent refuge bien abrité. On y trouvait aussi un entrepôt pour le trafic du tabac local et du cuir avec les boucaniers de Saint-Domingue. Cependant, ce sont bien les captures faites au dépens des Espagnols qui firent à la Tortue la réputation de meilleur repaire des flibustiers des Caraïbes.
En 1640, Le Vasseur prit le contrôle de l’île. Accompagné de nombreux hommes, celui-ci repoussa sans cesse les Espagnols, ce qui représenta un net avantage pour les pirates. Il devenait facile de se ravitailler en vivres et en poudre sur l’île: dès que les aventuriers y déposaient leur capture, au lieu de devoir l’emmener pour plusieurs mois de voyage, ils étaient, depuis le port de la Tortue, à une journée de l’embouchure des rivières et des ports de Saint-Domingue (Haïti de nos jours).
Le 6 juin 1665, la Tortue est rattachée à Bertrand d’Ogeron et donc au domaine français. D’Ogeron avait mené la vie de boucaniers sur la Côte de Port de Paix (Valparaiso), au Petit-Goâve. puis de 1662 à 1664, il avait contribué au développement de la Grande Antille en assurant le transport de centaines d’engagés depuis Nantes sur Léogane et le Petit-Goâve. Cependant, les flibustiers jouissaient encore d’une sorte de régime anarchique les laissant libres de toute imposition et leur permettant de trafiquer à leur guise.
Ce n’est que vers 1670 que l’ordre fut rétabli. Les turbulences allaient certes perdurer mais il n’était plus question de véritable insoumission.